Où est passé le Patriotisme ?

Depuis quelques mois un nouveau concept a surgi dans le débat par la bouche de notre premier Ministre : « le patriotisme économique ». Tous les ténors de l’Intelligence Economique en France ont applaudit des deux mains et tentent de rassurer l’opinion publique et les médias, en affirmant que tout cela n’a rien a voir avec du « protectionnisme » ou du « repli sur soi ». Il est presque devenu tendance dans certains salons parisiens de se gargariser de « patriotisme économique »…L’intention est louable et même agréable en ces temps troublés où notre vieille nation est brocardée, ridiculisée, humiliée voire même insultée.
Mais à y regarder de plus près, ce patriotisme là, n’a rien à voir avec celui que vantent le vieux général Bigeard (Adieu ma France aux éditions du Rocher) et le brillant historien Max Gallo (Fier d’être Français chez Fayard). Ces effets de manche et ces coups de menton devant les caméras, de certains de nos dirigeants sont suspects à nos yeux. Les tenants de cette « nouvelle vague d’entrepreneurs » ne seraient-ils pas avant tout au service de la haute finance, des multinationales et des grands groupes étrangers? Sous couvert d’un retour à certaines valeurs enracinées et fortes, ils biaisent le débat. Nous croirons à leur noble intention quand ils ne se limiteront pas seulement à l’économie, leur projet. Si l’on décide de défendre les intérêts de la France, il ne faut pas utiliser des caches sexe. Assumons notre patriotisme comme le font nos amis Américains, Allemands ou Russes. Que veut dire patriotisme si l’on a honte de sa patrie ? Que veut dire la France si on ne protège pas les Français ? Que veut dire économie si on ne valorise pas le travail ?

Qui sait que pendant que certains gobergent sur les vertus du « patriotisme économique », un soldat français est mort le 4 mars en Afghanistan, dans l’indifférence quasi générale. Il était marié et père de deux enfants. Le patriotisme commence lorsqu’on soutient et respecte ceux que la France envoie pour défendre notre civilisation, nos valeurs et nos intérêts, contre l’arbitraire et l’intolérance en Afghanistan, au Darfour, en Côte d’Ivoire et au Kosovo.
Il est triste de constater qu’aucun media d’envergure nationale n’a relevé la mort de cet officier marinier des commandos marines lors d’un accrochage avec des Talibans dans la région de Kandahar. Ce soldat est le deuxième à être victime de son devoir sur ce théâtre (un premier soldat des Forces spéciales est décédé suite à l’explosion d’une mine en septembre 2005). Pourquoi ne pas alerter et mobiliser l’opinion publique sur la menace que fait peser le terrorisme sur notre pays et sur les conséquences désastreuses qu’il aurait, comme à Madrid ou de Londres.

C’est très bien de parler de « patriotisme économique », mais il serait préférable de parler de patriotisme, tout court. Cette notion n’a rien d’agressif, ni d’offensif, mais elle reflète l’attachement d’un peuple à ses valeurs : la Liberté, l’Egalité et la Fraternité. Valeurs auxquelles il convient plus que jamais, d’ajouter la laïcité. C’est sur ce socle inébranlable que sont enracinés les principes fondamentaux de notre pays.

Le patriotisme qu’appelle de ses vœux notre premier ministre pourra exister quand nous retrouverons le goût, la fierté et l’honneur d’être Français. Quand nous célébrerons Austerlitz et non Trafalgar, quand nous commémorerons l’abolition de l’esclavage et non la traite négrière, quand nous chanterons ensemble la Marseillaise sans les sifflets, quand nous soutiendrons nos soldats courageux sans les comparer à des tortionnaires, quand nous cesserons de faire repentance à chaque occasion, quand et quand…
Etre un patriote, c’est aussi être un rêveur !

DH et JBJ