Les limites de l’enquête d’Edelman sur les ONG

La lettre d’Influencia commente cette semaine les résultats du septième baromètre de confiance annuel réalisé par Edelman dans 11 pays. Trois points faibles ressortent de la manière dont Edelman a réalisé cette étude :

1) Edelman n’aborde pas le problème du targeting. Comment évaluer la fiabilité des ONG qui fondent leur activité sur la traque systématique
des pratiques non éthiques des entreprises ? Qui note le sérieux des ONG qui se sont investies dans cette activité et surtout qui contrôle
leur activité pour éviter qu’elles soient manipulées par des concurrents déloyaux ? Un cas d’école a déjà mis en évidence cette faille dans le fonctionnement des ONG. En 1995, Greenpeace avait lancé une campagne de polémique très dure contre Shell pour
dénoncer les risques de coulage de la plate-forme pétrolière Brent Spar. Greenpeace avait présenté des excuses publiques à Shell après le
résultat de l’enquête du bureau Véritas. Ce précédent mettait en lumière les procédés des ONG qui accusent sans même aller demander
l’avis de l’entreprise visé. Cette pratique n’a pas disparu. Dans le débat sur l’eau, l’ONG Public Citizen n’a pas la réputation d’aller
voir les entreprises qu’elles dénoncent pour comparer ses arguments avec les témoignages qu’elle recueille sur le terrain.

2) On peut s’étonner de la valeur du jugement des sondés et s’interroger sur leur capacité à maîtriser l’ensemble des données du
problème. Influencia précise qu’ils ont désigné Microsoft en numéro 1 mondial en termes de capital confiance. Comment définissent-ils le mot confiance ? Est-ce la confiance des clients à l’égard des produits ou est-ce la confiance globale que les citoyens attribuent à Microsoft par
rapport à son comportement sur le marché ? Les détracteurs de Microsoft estiment que cette multinationale brouille les cartes dans les conflits juridiques soit en négociant des versements d’argent aux entreprises
qui portent plainte contre elles, soit en provisionnant des sommes très importantes pour mener des guerres d’usure dans les procédures
judiciaires et en ayant la capacité de payer des dizaines d’avocats durant des périodes très longues. Selon ces détracteurs, cette course à
la procédure dans le domaine du droit commence à fausser les lois de la concurrence. Ce type de problème ne semble pas être pris en compte par les sondés de l’étude d’Edelman.

3) Que dire enfin des ONG qui passent des accords avec des entreprises pour surveiller et donc se porter garante de leur moralité.
A partir du moment où une ONG reçoit de l’argent d’une entreprise dans ce but précis, elle devient juge et parti. Autrement dit, sa fiabilité
peut être remise en cause à tout instant si l’ONG pour une raison ou pour une autre tempère ses critiques. L’une des raisons pouvant être le
besoin d’argent pour financer son développement et le salaire de ses permanents. La problématique financière dans l’essor des ONG n’est pas
un sujet anodin. Lorsque Médecins du Monde a débattu sur l’éventualité de créer des ONG équivalentes dans des pays industrialisés, par exemple aux Etats-Unis, certains ont émis des réserves sur l’évolution de la politique suivie par MDM à travers le monde. Le versement de dons pouvait être plus important aux Etats-Unis et à terme la filiale serait en mesure d’avoir plus de moyens que la maison mère. A priori, cela ne dérangeait personne à condition que la philosophie d’action de MDM/USA ne diverge pas de celle de MDM/France sur des sujets sensibles de société.