La signature du protocole de Kyoto est peut-être la plus grande victoire des ONG préoccupées par la défense de l’environnement. Il s’agit de l’engagement des Etats à réduire leurs émissions de gaz a effet de serre. Mais cet engagement pourrait par manque d’anticipation et de réalisme avoir des conséquences inattendues.
En effet le principal gaz à effet de serre est le dioxyde de carbone, il est produit lors de la combustion de carbone fossile (pétrole, charbon, gaz), phénomène intéressant, la courbe des rejets de CO2 suit très exactement la courbe de croissance des économies, le CO2 est un sous-produit de la production d’énergie, donc de l’activité humaine.L’absence d’alternatives technologiques conduit à l’équation très simple : réduction d’émission = réduction d’activité économique. La prise de conscience de cette situation a eu une première conséquence, la non ratification par les États-Unis (premier pollueur) du protocole, concernant la Chine et l’Inde (deuxième et troisième): elles ne sont pour l’instant pas limitées par le traité.
Devant la contrainte, essentiellement dans les Etats européens, de réduire les émissions sans réduire l’activité économique ; les acteurs énergétiques, pétroliers en tête, ont ressorti des cartons un vieux projet : le CCS, la capture et le stockage du dioxyde carbone. Plus simplement il s’agit de capturer le CO2 à la sortie des cheminés des centrales énergétiques et de l’enfouir dans des structures géologiques stables, afin de réduire les émissions dans l’atmosphère.
Cette solution a quelques inconvénients, premièrement elle est chère de 80 à 150$ la tonne de CO2 capturée (une tonne de carbone fossile brûlé produit plus de 2.75 tonnes de CO2), deuxièmement elle est coûteuse énergétiquement, de l’ordre de 10 à 30% d’énergie perdu dans l’opération, donc augmentera la consommation de carbone fossile, l’exact opposé de l’esprit du protocole de Kyoto qui valorisait l’utilisation responsable des ressources et la sobriété énergétique.
Si l’on voit bien l’intérêt pour les compagnies pétrolières à s’engager dans cette voie : pouvoir vendre le service de capture et préserver voir augmenter leurs ventes d’hydrocarbures. La neutralité voir la bienveillance d’ONG (Green Alliance, Greenpeace, WWF), est plus surprenante, malgré la stupidité du concept elles ne s’y opposent pas à sa mise en place, pire certaines le soutiennent.
A quoi est du cette alliance inattendue ? Peut-être tout simplement au fait que les énergies renouvelable qui devaient prendre la place du pétrole ne sont pas encore disponibles et qu’il n’existe qu’une option pour produire massivement de l’électricité sans émettre de CO2 : l’énergie atomique. En conséquence, les mécanismes issus de Kyoto sont donc des outils efficaces et très involontaires de promotion du nucléaire.
Leur empressement à imposer des contraintes sans disposer d’alternatives technologiques aux problèmes énergétiques, leur dogmatisme en termes de solutions énergétiques, les poussent à promouvoir ou tolérer des solutions contre-productives, contraires à l’esprit de Kyoto : CCS, retour du charbon, etc… quitte à sacrifier un temps l’environnement, à forger une alliance de circonstance avec les pétrolier. Tout plutôt que le nucléaire, tout plutôt que d’admettre leurs erreurs.
Stéphane Ledoux