Les multiples discours et prises de position concernant la constitution européenne ont un point commun: l’absence de réflexion sur l’idée de puissance. Les partisans du oui, comme les partisans du non, se montrent incapables de présenter l’amorce d’une doctrine concrète et cohérente pour illustrer ce qui n’est pour l’instant qu’un vœu pieux sur l’Europe/puissance. La construction européenne ne se fait pas sous une cloche de verre à l’abri des affaires du monde. Coincée entre la volonté de suprématie des Etats-Unis et la recherche de puissance de la Chine, dsans parler des autres, l’Union européenne aura bien du mal à garder son cap en faisant plaisir à tout le monde. Certes, le discours de l’Europe a de quoi séduire les peuples qui aspirent à la paix et à plus de justice. Il existe sans doute dans le monde une majorité silencieuse qui souhaite que les relations internationales s’organisent autour d’un commerce plus équitable, d’un modèle économique plus social et lqui aspire à une reconnaissance universelle des droits de l’homme et du citoyen. Mais ce n’est pas parce que cette tendance existe que l’Europe trouvera naturellement son positionnement dans le concert des nouveaux blocs géoéconomiques.Dans l’état actuel des rapports de force entre puissances, l’Europe se bat sur deux fronts, à la fois pour ne pas devenir le simple vassal des Etats-Unis mais aussi pour ne pas être déstabilisée par les offensives commerciales de la Chine. Chacun sait que cette position stratégique est intenable dans le domaine militaire. Elle ne l’est pas plus dans le domaine civil. Les Etats-Unis contournent les défenses naturelles de l’Europe par l’amont sur de multiples fronts. Ils ne font que répéter la stratégie de pérennité des empires qui, jadis, cherchaient à contrôler les axes d’échange par les voies terrestres et maritimes, tout en se se donnant le droit d’imposer leur monnaie et de vivre au crochet des pays qu’ils dominaient militairement. Les Etats-Unis ne limitent pas leur contrôle aux sources d’énergie pétrolières.
Ils ont obligés d’étendre ce contrôle à tous les leviers vitaux de l’économie mondiale (industries d’armement, finances, énergies, industrie de la sécurité, technologies de l’information). Cette stratégie de domination se double d’une stratégie de pénétration au sein de nos systèmes de recherche et de production dans les secteurs les plus prometteurs. La biotechnologie est un cas d’école (voir à ce propos les infos diffusées par le site knowckers.org sur France Biotech). Mais ce n’est pas le seul, comme le prouvent les accords récents passés entre le CNRS et le département d’énergie américain, l'accord signé entre l'Institut National de Recherche en Informatique et en Automatisme (INRIA) et Microsoft, la levée de fonds au bénéfice de la société américaine Network Chemistry (voir intelligence online n°499) effectuée conjointement par France Telecom et la société de capital risque de la Central Intelligence Agency IN-Q-Tel. La Chine contourne les défenses naturelles de l’Europe par l’aval. En s’engouffrant dans la brèche créée par la levée des barrières douanières et en jouant habilement avec le cours de sa monnaie, la Chine crée une insécurité économique dans de nombreuses branches industrielles traditionnelles des pays de l’Union européenne (le textile n’est qu’un cas parmi d’autres). Le chantage aux contrats passés sur les produits de haute technologie (si l’Europe résiste, la Chine achètera des produits concurrents des produits européens) révèle le piège dans lequel s’engouffrent jour près jour les pays européens.
L’Europe est condamnée à se sortir de cette impasse. Contrairement à ce que pensent les partisans du oui, la constitution européenne n’apporte pas de stratégie. Elle confirme simplement une tendance amorcée depuis le Traité de Rome. Contrairement à ce que pensent les partisans hétéroclites du non, la dénonciation du libéralisme ou le refus du déclin de l’Eta-Nation n’apporte aucune réponse sérieuse à cette problématique de puissance qui nous interpelle dans notre quotidien. N’en déplaisent aux opportunistes de tout bord, il va falloir se battre pour exister et ce combat sera très difficile car il opposera des pays qui seront tantôt alliés sur un point, tantôt adversaires sur un autre. Nous sommes entrées dans une logique floue qui risque de durer longtemps. A quelques exceptions près, le monde politique, l’Etat et les forces vives de la nation ne se sont pas préparées à ce combat. Il est encore temps.
Christian Harbulot
Ils ont obligés d’étendre ce contrôle à tous les leviers vitaux de l’économie mondiale (industries d’armement, finances, énergies, industrie de la sécurité, technologies de l’information). Cette stratégie de domination se double d’une stratégie de pénétration au sein de nos systèmes de recherche et de production dans les secteurs les plus prometteurs. La biotechnologie est un cas d’école (voir à ce propos les infos diffusées par le site knowckers.org sur France Biotech). Mais ce n’est pas le seul, comme le prouvent les accords récents passés entre le CNRS et le département d’énergie américain, l'accord signé entre l'Institut National de Recherche en Informatique et en Automatisme (INRIA) et Microsoft, la levée de fonds au bénéfice de la société américaine Network Chemistry (voir intelligence online n°499) effectuée conjointement par France Telecom et la société de capital risque de la Central Intelligence Agency IN-Q-Tel. La Chine contourne les défenses naturelles de l’Europe par l’aval. En s’engouffrant dans la brèche créée par la levée des barrières douanières et en jouant habilement avec le cours de sa monnaie, la Chine crée une insécurité économique dans de nombreuses branches industrielles traditionnelles des pays de l’Union européenne (le textile n’est qu’un cas parmi d’autres). Le chantage aux contrats passés sur les produits de haute technologie (si l’Europe résiste, la Chine achètera des produits concurrents des produits européens) révèle le piège dans lequel s’engouffrent jour près jour les pays européens.
L’Europe est condamnée à se sortir de cette impasse. Contrairement à ce que pensent les partisans du oui, la constitution européenne n’apporte pas de stratégie. Elle confirme simplement une tendance amorcée depuis le Traité de Rome. Contrairement à ce que pensent les partisans hétéroclites du non, la dénonciation du libéralisme ou le refus du déclin de l’Eta-Nation n’apporte aucune réponse sérieuse à cette problématique de puissance qui nous interpelle dans notre quotidien. N’en déplaisent aux opportunistes de tout bord, il va falloir se battre pour exister et ce combat sera très difficile car il opposera des pays qui seront tantôt alliés sur un point, tantôt adversaires sur un autre. Nous sommes entrées dans une logique floue qui risque de durer longtemps. A quelques exceptions près, le monde politique, l’Etat et les forces vives de la nation ne se sont pas préparées à ce combat. Il est encore temps.
Christian Harbulot