issance géopolitiqueLe rapport que la Central Intelligence Agency vient de publier sur l’Europe a le mérite de nous faire réfléchir sur les enjeux à venir. Coincée entre la Chine et les Etats-Unis, l’Europe n’a d’autre idéal historique que de préfigurer ce que pourrait être dans un horizon lointain, voire très lointain, l’amorce de construction d’un gouvernement planétaire. Le projet européen sous-tend une vision démocratique multiculturelle, un développement durable centré de plus en plus sur la coopération internationale et non la guerre économique, ainsi qu’une volonté de sortir peu à peu des dynamiques de puissance qui dominent l’Histoire du monde depuis le début des civilisations. Cette position de bon sens est la seule voie raisonnable. Bernard Nadoulek qui est en train de finir un ouvrage de référence sur l’épopée des civilisations (nous en parlerons bientôt sur Infoguerre) nous en fait la démonstration à partir d’une analyse comparée des principales civilisations sur plusieurs centaines de page. Toute autre démarche mène à la guerre et à l’autodestruction.Mais qui croit à la réussite d’une telle audace humaniste ? Ni les néoconservateurs de M. Bush, ni les partisans du nationalisme chinois, ni M. Poutine. Le silence des élites indiennes, asiatiques, arabes et même latino-américaines sur ce pari audacieux, n’est pas non plus dénué de signification. L’idéal historique européen ne semble guère crédible aux yeux des autres prétendants à la course à la puissance. La Société des Nations est morte de l’accumulation des contradictions qui ont miné les relations internationales entre les deux guerres mondiales. L’Organisation des Nations Unies survit aujourd’hui au cynisme de la superpuissance américaine mais ne rassure, ni n’impressionne personne. Elle est avant tout une tribune libre dans le concert des puissances. Les résolutions des Nations Unies rappelent l’existence d’un Droit International qui ne prend effet que lorsque les grands de ce monde se mettent d’accord pour l’appliquer.
Comment tenir durant la longue période de transition qui doit marquer l’avènement de l’idéal historique européen ? Si on devait rajouter un chapitre au rapport pessimiste de la CIA, c’est bien à cette question qu’il faudrait répondre. Soyons clair, la CIA ne croit pas à la capacité de l’Europe telle qu’elle se construit, de préserver ses chances de développement d’un système politique cohérent. Certes, un document réalisé par les analystes d’une agence de renseignement étrangère peut être décrypté comme une manœuvre d’influence ou d’intimidation, il n’en demeure pas moins vrai qu’il dit tout haut ce que de nombreux pays pensent tout bas. Les peuples européens ont un défaut majeur : ils choisissent leur mémoire. La commération des crimes nazis contre l’humanité est un impératif absolu. Il est dommage qu’on oublie une autre commémoration, celle qui aurait pu les empêcher. Les accords de Munich signés par la France et la Grande Bretagne avec Adolf Hitler sont une erreur majeure. Les peuples européens ont validé ce jour-là avec enthousiasme la signature de ces accords de la lacheté des démocraties occidentales qui encouragèrent Hitler à se lancer dans la seconde guerre mondiale. Le résultat de cet hymne à la paix chanté à Paris et à Londres lors du retour du premier ministre français Daladier et du premier ministre britannique Chamberlain, se chiffre à 50 millions de victimes. Une telle erreur ne doit pas se répéter. Relu sous un autre angle, c’est ce que suggère inconsciemment le rapport de la CIA.
C’est bien beau d’avoir un idéal historique où on lie la construction de la démocratie au rejet implicite de la dynamique de puissance, encore faut-il avoir les moyens de l’imposer à l’ensemble du monde. Combien de divisions répétait Staline en se moquant du Vatican ? Les éditoriaux de Libération, du Monde ou de France Inter se drapent dans la vertu de cet idéal historique sans expliquer pourquoi le précédent a abouti à la pire des catastrophes. Devant l’inévitable guerre des ressources qui se profile à l’horizon, sachant que nous sommes en train de perdre la bataille décisive des technologies de l’information, fer de lance de l’économie mondiale, les tenants de l’idéal historique européen se drapent dans des stratégies du paraître et multiplient les déclarations rassurantes. Il en faut nettement plus pour effacer le symbole de la non commémoration des accords de Munich.
Christian Harbulot
Référence : Le Figaro, Le rapport de la CIA qui agace Bruxelles, 21 janvier 2005
Comment tenir durant la longue période de transition qui doit marquer l’avènement de l’idéal historique européen ? Si on devait rajouter un chapitre au rapport pessimiste de la CIA, c’est bien à cette question qu’il faudrait répondre. Soyons clair, la CIA ne croit pas à la capacité de l’Europe telle qu’elle se construit, de préserver ses chances de développement d’un système politique cohérent. Certes, un document réalisé par les analystes d’une agence de renseignement étrangère peut être décrypté comme une manœuvre d’influence ou d’intimidation, il n’en demeure pas moins vrai qu’il dit tout haut ce que de nombreux pays pensent tout bas. Les peuples européens ont un défaut majeur : ils choisissent leur mémoire. La commération des crimes nazis contre l’humanité est un impératif absolu. Il est dommage qu’on oublie une autre commémoration, celle qui aurait pu les empêcher. Les accords de Munich signés par la France et la Grande Bretagne avec Adolf Hitler sont une erreur majeure. Les peuples européens ont validé ce jour-là avec enthousiasme la signature de ces accords de la lacheté des démocraties occidentales qui encouragèrent Hitler à se lancer dans la seconde guerre mondiale. Le résultat de cet hymne à la paix chanté à Paris et à Londres lors du retour du premier ministre français Daladier et du premier ministre britannique Chamberlain, se chiffre à 50 millions de victimes. Une telle erreur ne doit pas se répéter. Relu sous un autre angle, c’est ce que suggère inconsciemment le rapport de la CIA.
C’est bien beau d’avoir un idéal historique où on lie la construction de la démocratie au rejet implicite de la dynamique de puissance, encore faut-il avoir les moyens de l’imposer à l’ensemble du monde. Combien de divisions répétait Staline en se moquant du Vatican ? Les éditoriaux de Libération, du Monde ou de France Inter se drapent dans la vertu de cet idéal historique sans expliquer pourquoi le précédent a abouti à la pire des catastrophes. Devant l’inévitable guerre des ressources qui se profile à l’horizon, sachant que nous sommes en train de perdre la bataille décisive des technologies de l’information, fer de lance de l’économie mondiale, les tenants de l’idéal historique européen se drapent dans des stratégies du paraître et multiplient les déclarations rassurantes. Il en faut nettement plus pour effacer le symbole de la non commémoration des accords de Munich.
Christian Harbulot
Référence : Le Figaro, Le rapport de la CIA qui agace Bruxelles, 21 janvier 2005