Total et le rapport Kouchner sur la Birmanie

La firme Total a fait la démonstration de sa méconnaissance des mécanismes informationnels de la société civile. La bavure Kouchner est un cas exemplaire de négligence professionnelle dans le domaine de l’intelligence économique. Rappelons les faits. La firme Total est attaquée depuis une dizaine d’années par voie de presse et par le biais d’Internet à la suite de protestations puis de plaintes en justice déposés par des citoyens birmans contraints au travail forcé dans le cadre de la construction d’un pipe-line. En commandant un rapport à Bernard Kouchner sur la polémique dont elle est victime en Birmanie, Total pensait bien faire. Pour améliorer son image dans l’opinion publique, un responsable du groupe Total a choisi de solliciter un spécialiste de l’humanitaire. B. Kouchner est à l’origine des french doctors et revendique le droit d’ingérence pour la défense des Droits de l’Homme. Il a commis une grave erreur de communication. Si la personnalité de Kouchner est appréciée dans le microcosme parisien et dans les dîners en ville, elle est fortement controversée dans le monde des ONG. C’est ce qui explique pourquoi la sortie du rapport Kouchner a créé l’inverse de l’effet recherché. En prenant connaissance des propos favorables du french doctor à l’argumentation de Total, les milieux des ONG sont parties en guerre contre lui, en l’accusant de trahir son camp. Conçue comme une subtile opération de communication, le rapport Kouchner est devenu une épine supplémentaire dans le pied de Total. Cumulant les affaires Erika, AZF et l’héritage Elf, le pétrolier français préfère s’en tenir à la surveillance des cours de bourse et concentre son attention sur les remarques des actionnaires. Cet autisme risque un jour de coûter très cher au dernier pétrolier français.