Focus sur l’International Public Information

Les Etats-Unis ont été contraints de réorganiser les capacités du gouvernement en matière de « Public Diplomacy », ceci en raison de l’important développement du « Soft Power » américain, mais également à cause de la diminution des agences de coordination de ces activités. En effet, aucune agence gouvernementale ne centralisait totalement les opérations visant à « vendre » la politique étrangère et contrer l’image négative des Etats-Unis dans certains pays.Pour remédier à cette situation, par un « Presidential Decision Direction » secret (le PDD 68), l’administration Clinton avait créée le « International Public Information (IPI) » chargé de développer et de coordonner les activités et les stratégies d’information des Etats-Unis. Promulgué le 30 avril 1999, le PDD 68 ordonnant la création de l’IPI devait remplacé le NSDD 77 (Management of Public Diplomacy Relative to National Security) du Président Reagan datant du 14 février 1983. L’IPI avait ainsi récupéré de nombreuses fonctions qui étaient attribuées à l’USIA (U.S. Information Agency) qui a été démantelée. L’IPI dépend directement de l’« Under Secretary for Public Diplomacy and Public Affairs”, branche du Département d’Etat (1).

La première fonction de l’IPI est de coordonner les objectifs, les thèmes et les messages à destination de l’étranger, ceci afin d’éviter toute contradiction. Pourtant son rôle ne se cantonne pas seulement à cette coordination. Selon les propres termes de la charte de l’IPI, ce dernier a été créé pour « influencer les audiences étrangères » afin de soutenir la politique étrangère américaine et contrer la « propagande ennemie ». Cette influence doit également « concourir à la prospérité économique des Etats-Unis et répandre la démocratie ».
L’IPI aurait également le contrôle sur les « informations militaires internationales » (International Military Informations, IMI) afin « d’influencer les émotions, les motivations, le raisonnement, et finalement le comportement des gouvernements, organisations, groupes et individus étrangers. » Pas étonnant que cette précision de la Charte soit identique en tout point à la définition qui est donnée aux opérations psychologiques, puisque que les IMI sont les « PsyOps ».

Cependant, la charte souligne que les informations répandues ne doivent pas conduire à tromper les audiences étrangères, et que les programmes d’information doivent être « véridiques ». En effet, depuis la mondialisation des médias et des flux de communication, il est impossible de garantir que des messages à destination d’une audience étrangère ne soit pas redirigée vers les citoyens américains. Or depuis l’amendement Zorinsky, il est interdit de produire ou de diffuser des programmes d’influence vers l’opinion publique américaine. Certains observateurs croient toutefois que le PDD 68 est la dernière tentative en date qui vise à « éduquer » ou « persuader » les citoyens des Etats-Unis (2).

En marge de cette polémique intra-américaine, le danger reste réel pour les audiences étrangères. Alors que la désinformation, la déception et l’intoxication agissent sur l’information en elle-même pour influencer les prises de décision de la cible (faits réels-->faits manipulés/vision intacte-->prise de décision), les techniques de gestion des perceptions (Perception Management) utilisent des faits véridiques et vérifiables dont elles modifient le sens et la vision (faits réels-->faits intacts/vision manipulée-->prise de décision). Le « Perception Management » est ainsi plus difficilement décelable car il implique des opérations à long terme qui agissent directement sur le cœur du processus de raisonnement de la cible.

Alimentés en permanence par des informations sur le pays (sondages d’opinion, organisation de la société, polémiques…), ces agences fournissent des programmes d’influence pro-actifs qui permettent de « promouvoir de manière offensive les objectifs de la politique étrangère des Etats-Unis au travers des services d’information mondiaux » (« […] will enable the field to aggressively promote our foreign policy goals through world-class information services »)


(1) Précisions sur l’« Under Secretary for Public Diplomacy and Public Affairs
Le “Under Secretary for Public Diplomacy and Public Affairs” s’assure que la « Public Diplomacy » (les relations publiques du gouvernement) sont en harmonie avec les « Public Affairs » et la diplomatie traditionnelle. Il est composé du :

- “Bureau of Public Affairs” dont l’objectif est d’aider les citoyens américains à comprendre la politique étrangère des Etats-Unis, via des conférences de presse, des interviews radio et télévisuelle avec les responsables du département, et des supports audiovisuels.
- “Bureau of Educational and Cultural Affairs” a pour objectif d’encourager une meilleure compréhension entre les Etats-Unis et les autres pays du monde, ceci grâce à des programmes d’échanges culturels et professionnels, et des présentations de l’Histoire, de la société, de la culture…des Etats-Unis.
- « Office of International Information Programs » est le principal service stratégique de communications internationales du Département d’Etat. Ce bureau produit des programmes (via Internet, publications, journaux électroniques, CD-Roms…) à destination d’audiences étrangères ciblées, comme les médias, les leaders d’opinion, l’opinion publique…dans plus de 140 pays à travers le monde.


(2) Bering, Helle, “Professor Albright goes live”, in Washington Times, 04/08/1999.

AVS