Les liens criminels du groupe russe Alfa

Le groupe Alfa a été créé au début des années 1990 par Mikhail Friedman et Piotr Aven (ancien ministre de Boris Eltsine).
Ce groupe rassemble de nombreuses entités issues de différents secteurs tels que la banque (Alfa Bank), les télécommunications (Vimpelcom), le pétrole (TNK), les assurances, l’agroalimentaire...Alpha Bank

Selon le classement Interfax, l’Alfa Bank est la cinquième banque russe et la première banque privée de Russie. En 1999, l’Alfa Bank avait reçu une aide de l’Arko (l’agence pour la restructuration bancaire) pour créer des filiales dans dix régions de Russie. Elle a ainsi créé le deuxième réseau bancaire, derrière la Sberbank d’Andreï Kazmine.
L’Alfa Bank aurait bien résisté à la crise financière de 1998 en vendant ses bons du Trésor (GKO) avant la crise. Des procès seraient toujours en cours pour délits d’initiés…

Vimpelcom

En 2001, Alfa a acquis une participation de contrôle dans Vimpelcom, société cotée à la Bourse de New York, pour 247 millions de dollars, soit 25 % des droits de vote.
Vimpelcom est le numéro deux de la téléphonie mobile en détenant 25 % du marché russe. Cette acquisition devait permettre à Vimpelcom d’accélérer le développement régional pour faire face à son principal concurrent MTS qui détient 35 % du marché russe de la téléphonie mobile.

Tioumen Neftgas Company (TNK - compagnie pétrolière de Tioumen)
TNK, qui appartient au groupe Alfa et à Access Renova (AAR), réalise des percées fulgurantes sur le marché du gaz et du pétrole locaux. Depuis février 2003 et l’investissement de BP-Amoco, le nouvel ensemble TNK est devenue le troisième groupe pétrolier en Russie. BP-Amoco a investi 6,75 milliards de dollars, le plus important investissement étranger en Russie, pour créer cette société commune avec Alfa et Access Renova (AAR). BP-Amoco contrôle ainsi un tiers du troisième groupe russe de pétrole…

Pourtant, les relations entre TNK et BP-Amoco n’ont pas toujours été aussi bonnes. En novembre 1999, suite à une procédure de mise en faillite contestée, TNK avait pris le contrôle de Tchernogorneft, une filiale de Sidanko dont BP-Amoco était actionnaire, pour quelques 176 millions de dollars. Cette acquisition donna à TNK une majorité de contrôle dans Sidanko, et faisait perdre à BP-Amoco une pièce maîtresse de son investissement en Russie.
Cependant, sans liquidité, TNK ne pouvait pas développer le site de Samotlor en Sibérie occidentale. Les banques étrangères se sont rapidement fermées sous la pression des lobbies anglo-saxons. Ce fut notamment le cas de la banque américaine Export-Import (Eximbank) qui refusa un prêt de 500 millions de dollars sous l’administration Clinton.
En échange d’une prise de participation de 25 % de TNK dans Sidanko, Tchernogorneft fut finalement restituée à Sidanko. Depuis, TNK et Tchernogorneft (BP-Amoco) développent ensemble le gisement de Samotlor.

Crown Ressources

Fondée en 1996 à Gibraltar, Crown Ressources est une société de trading détenue par le groupe Alfa qui est aujourd’hui basée à Zoug en Suisse. Elle le résultat de la fusion des activités de négoce du groupe Alfa et de sa filiale Crown Trade & Finances, basée aux îles Vierges.
Elle est spécialisée dans l’exportation de pétrole russe vers l’Europe occidentale. Elle a ouvert des succursales à Londres et Gibraltar, ainsi que des bureaux de représentation à Moscou, Singapour, Caracas, Bagdad et La Havane.

Les dirigeants du groupe Alfa

Mikhaïl Friedman et Piotr Aven sont les deux fondateurs de l’Alfa Group.
Piotr Aven connaît Vladimir Poutine depuis le début des années 1990 quand il était ministre du Commerce extérieur. A cette époque, il avait accordé au Comité des relations extérieures de St Petersbourg (alors dirigé par Poutine) le droit exclusif de distribuer des licences à l’exportation. En 1992, il sortit Poutine d’une affaire qui l’accusait de s’être livré à une opération frauduleuse de troc de matières premières contre des produits alimentaires. Des millions de dollars auraient disparus à cette occasion…
Cette proximité avec l’actuel président russe a permis au group Alfa de placer trois collaborateurs dans l’administration présidentielle, et de contrôler un grand groupe de députés à la Douma.

Né le 21 avril 1964 à Llov, ville située à l’ouest de l’Ukraine, Mikhail Friedman est issu d’une famille juive comme la plupart des autres oligarques. Diplômé du Moscow Institute of Steel and Alloys, il a été ingénieur pour Electrostal Factory avant de créer en 1991 le groupe Alfa Consortium avec Piotr Aven. Il assume à présent les fonctions de président du conseil de surveillance. Selon le classement Forbes des plus grandes fortunes mondiales, Mikhail Friedman détiendrait la septième fortune de Russie.
Sous l’époque communiste, les billets de théâtre étant réservés aux membres du parti, pour s’en procurer sans relation, il était nécessaire de passer par des intermédiaires. Dans sa jeunesse, Mikhail Friedman a été impliqué dans ce marché noir de vente de ticket de théâtre (Theatre Mafia).
Très influent en Russie, il a été épargné par la campagne contre les « oligarques » en 2001 de Vladimir Poutine. Il est l’un des 27 membres de l’Union russe des industriels et des entrepreneurs, cercle qui rassemble la plupart des chefs d’entreprise russes.

Mikhaïl Friedman est lié à Marc Rich, un négociant de métaux dans les années 1970, qui poursuivi par les autorités américaines, s’est réfugié en Suisse dès 1983 et a renoncé à sa nationalité américaine. Gracié par le président Clinton, Marc Rich a cédé une de ses sociétés (Marc Rich & Co Investments – MRI) basée en Suisse à Crow Ressources. L’objectif était de resserrer ses liens avec le négoce russe qui est la base arrière de ses activités. MRI est l’une des premières acquisitions par les Russes d’une compagnie avec un nom aussi connu. Avec ce rachat le groupe Alfa entre dans le marche très fermé du brut du Golfe de Guinée et des petits métaux stratégiques.
Il est intéressant de noter que nous retrouvons Marc Rich dans deux scandales d’actualité concernant directement la France : le naufrage du Prestige et la liquidation de Metaleurop.

Les dessous du groupe Alfa

Crown Ressources, soit le groupe Alfa, était l’affréteur du Prestige dont le pétrole brut pollue toujours les côtes espagnoles et françaises. Pour éviter toute poursuite, les dirigeants d’Alfa Group ont cédé Crown Ressources à sa direction (Alexei Kouzmitchov en est le PDG) qui ont changé le nom pour devenir ERC Trading.

En 1999, le groupe Alfa a été mise sur la liste noire de la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD) suite à l’opération de TNK sur Tchernogorneft. En février 2002, le groupe Alfa a également été assigné devant les tribunaux de New York par la compagnie canadienne Norex Petroleum qui a invoqué la législation anti-mafia pour réclamer 1,5 milliards d’euros de réparation. Les holdings du groupe sont implantées dans des paradis fiscaux, comme le Alfa Bank Holding Ltd qui est basé à Gibraltar, ou le Alfa Finance Holding SA au Luxembourg.

En France, la DST soupçonne le groupe Alfa d’être étroitement lié à l’organisation criminelle moscovite Solntsevo. Cette dernière, qui tire son nom de l’une des cités-dortoirs au sud de Moscou, regrouperait 1500 membres chapeautant une demi-douzaine de groupes criminels (drogues, racket, blanchiment d’argent, corruption de fonctionnaires…), à la tête de laquelle serait Sergueï Mikhaïlov.

AVS