Les atouts du pétrole irakien.
Avec 112.5 milliards de barils de pétrole par an, l’Irak possède la 2ème réserve au monde après l’Arabie Saoudite (261.8 milliards de barils) et représente plus d’1/9ème des réserves mondiales de cette ressource (908 milliards de barils). Les géologues considèrent que seulement 14% du pétrole américain et 39% du russe restent disponibles quand 65% du brut saoudien et au moins 80% de l’irakien se trouvent encore sous terre.Par ailleurs le pétrole irakien présente l’avantage non négligeable d’avoir des coûts de production très intéressants tenant au fait que les conditions d’exploitation sont extrêmement faciles. En effet les nappes se situent à des endroits accessibles sans difficultés, et le forage se fait aisément en raison de la faible profondeur à laquelle se trouve le pétrole. Ainsi les spécialistes s’accordent pour dire que les coûts d’exploitation sont 2 fois moins importants dans ce pays que dans les autres . On n'a besoin pour l'extraire d'aucune technologie spécifique, les gisements sont connus, peu profonds, en zone semi-désertique, et le potentiel humain sur place demeure de grande qualité, souligne un expert de l'IFP.
Quant à la concurrence, chaque nouveau baril produit en Russie nécessiterait environ 12 000 dollars d'investissement, 18 000 dollars en mer du Nord et jusqu'à 22 000 dollars pour le pétrole extrait par les plate-formes offshore profond, en Afrique ou en Amérique du Sud.
Même l'Arabie saoudite, en raison de gisements plus vieux et plus petits, devrait débourser entre 4 000 et 8 000 dollars par baril supplémentaire produit. Bref, comme le souligne un observateur : Si les Etats-Unis décident de mettre 20 à 30 milliards de dollars dans une guerre en Irak, c'est qu'ils savent pouvoir en recueillir le retour sur investissement assez vite.
Le désir américain de contrôle du pétrole irakien.
Les USA cherchant à limiter leur dépendance vis à vis du l’Arabie Saoudite mènent une politique visant à leur octroyer l’hégémonie sur les ressources pétrolières. Dans cette optique l’Irak devient une opportunité à saisir car elle représente une nouvelle source d’approvisionnement primordiale .
La diversification géographique des ressources en hydrocarbures devient un objectif récurrent de la politique américaine. Exxon Mobil et Chevron Texacco sont trop centrés sur le continent américain. Leurs alliés britanniques lorgnent également sur l’Irak car BP n’est présente que dans les zones ou les gisements rendent les conditions d’exploitation onéreuses. Royal Dutch se trouve pénalisée par l’importance de ses avoirs dans des régions jugées instables (Nigéria ,Angola) .
Les oppositions à la politique américaine.
La volonté d’intervention américaine en Irak a soulevé des oppositions dans la communauté internationale pour plusieurs raisons. En premiers lieux, certaines licences d’exploitation ont été accordées par Bagdad à des entreprises non-américaines mais ne deviendront effectives qu’après la levée du blocus imposé via l’ONU par Washington. Mais pour l’heure, elles n’ont aucune valeur normative. Ces entreprises (une douzaine, mais surtout françaises, russes) craignent de voir ces accords remis en cause en cas de changement de régime. Par ailleurs, il semble acquis que les firmes américaines seront avantagées si Saddam Hussein est renversé et qu’un régime sous tutelle américaine est instauré.
La France en première s’est opposée à la politique américaine de recours systématique de à la force contre l’Irak (c’est peut-être d’ailleurs ce qui explique la fragilisation de la France dernièrement dans ces zones d’influences traditionnelles comme c’est le cas en Côte d’Ivoire). Les discussions ont été vives à l’ONU où la Russie a soutenu la position française. Un compromis a été trouvé sous la forme de la résolution 1441 de l’ONU. Celle-ci prévoit que l’usage de la force contre l’Irak sera possible s’il s’avère qu’il existe des armes de destructions massives, ou si les inspecteurs de l’ONU sont empêchés de travailler dans de bonnes conditions ; mais le recours à la violence doit avoir été décidé par l’ONU.
Néanmoins, la France semble s’être résignée : des préparatifs militaires pour février 2003 sont en cours et Total-Fina fait du lobbying auprès de Washington pour « l’après Saddam ». Ainsi, en dépit d’une légère accalmie il serait étonnant que les américains ne trouvent aucun motif d’intervention en Irak .
Les enjeux géopolitiques à moyen ou long termes .
La « grande stratégie » américaine .
La grande stratégie américaine a pour ambition de contrôler les axes d’approvisionnement en hydrocarbures que sont le Caucase et le Moyen-Orient. L’intervention en Afghanistan a permis aux américains de se positionner en Asie mineure. Les américains se sont désormais installés en Azerbaïdjan, en Ouzbékistan, en Kirghizie, et plus récemment en Géorgie. Leur présence en Asie centrale leur permet en outre de contenir la « super-puissance » en devenir qu’est la Chine. Environ 60% de l’approvisionnement en pétrole de cette dernière se fait au Moyen Orient. Lles USA, en contrôlant cette région, peuvent par la même occasion contenir toutes les velléités offensives chinoises en maîtrisant directement ses sources d’approvisionnement. Le contrôle de l’axe Ankara-Bagdad-Téhéran-Caucase passe donc par une intervention au Moyen-Orient dont l’Irak n’est qu’une première étape. Les Etats-Unis vont tenter de greffer la démocratie en Irak (comme jadis au Japon) après la chute du régime de Saddam Hussein. Cette démocratie coercitive sera présentée comme contre-modèle aux régimes de la région qui leurs sont hostiles. Parmi eux se trouve l’Arabie Saoudite qui depuis le 11 septembre n’est plus perçue comme un allié privilégié car compromis avec Al Qaida. Mais pour l’heure la disparition du régime de Saddam Hussein est la condition « sine qua non » de leur « grande stratégie ». Celle-ci vise, en instituant un régime démocratique en Irak, à isoler l’Iran et à marginaliser, grâce au pétrole irakien l’importance de celui d’Arabie Saoudite.
La discrète stratégie Chinoise .
Avec la question taiwanaise, l’enjeu pétrolier est une des grandes obsessions qui hante la politique étrangère de Pékin. Dans la dernière décennie la consommation de pétrole a crû de 6% alors même que sa production est proche de la stagnation car ses réserves historiques dans le nord du pays sont en voie d’épuisement et les nouveaux gisements dans la province musulmane du Xinjiang souffrent de difficultés d’exploitation.
Le Moyen-Orient qui fournit actuellement les 2/3 des besoins de la Chine en Hydrocarbure en fournira jusqu’à 80% à l’horizon 2010. Dans ces conditions, la Chine suit avec attention l’évolution des tensions au Moyen-Orient ; d’autant plus que la présence de troupes américaines en Afghanistan a ravivé la crainte d’un encerclement. Déjà présent à l’ouest en mer de Chine, le 11 septembre a offert aux américains le prétexte de s’encrer plus fortement en Asie Centrale. Les chinois dont les firmes pétrolières s’étaient multipliées en Asie Centrale (surtout au Kazakhstan) pour s’affranchir de la tutelle américaine (éventuellement en cas de crise du côté de Taiwan),voient donc d’un très mauvais œil le désir hégémonique des américains pour la maîtrise des routes du pétrole .
La Chine qui reste objectivement la plus sérieuse menace des USA dans le futur, paraît être la plus menacée par la politique américaine. Reste à voir quelle incidence la politique extérieure des Etats-Unis aura sur les relations entre les deux pays et quelle contre-attaque peut être menée par la Chine.
Analyse réalisée en Janvier 2003 par des Etudiants de l’Ecole de Guerre Economique ( EGE)
Avec 112.5 milliards de barils de pétrole par an, l’Irak possède la 2ème réserve au monde après l’Arabie Saoudite (261.8 milliards de barils) et représente plus d’1/9ème des réserves mondiales de cette ressource (908 milliards de barils). Les géologues considèrent que seulement 14% du pétrole américain et 39% du russe restent disponibles quand 65% du brut saoudien et au moins 80% de l’irakien se trouvent encore sous terre.Par ailleurs le pétrole irakien présente l’avantage non négligeable d’avoir des coûts de production très intéressants tenant au fait que les conditions d’exploitation sont extrêmement faciles. En effet les nappes se situent à des endroits accessibles sans difficultés, et le forage se fait aisément en raison de la faible profondeur à laquelle se trouve le pétrole. Ainsi les spécialistes s’accordent pour dire que les coûts d’exploitation sont 2 fois moins importants dans ce pays que dans les autres . On n'a besoin pour l'extraire d'aucune technologie spécifique, les gisements sont connus, peu profonds, en zone semi-désertique, et le potentiel humain sur place demeure de grande qualité, souligne un expert de l'IFP.
Quant à la concurrence, chaque nouveau baril produit en Russie nécessiterait environ 12 000 dollars d'investissement, 18 000 dollars en mer du Nord et jusqu'à 22 000 dollars pour le pétrole extrait par les plate-formes offshore profond, en Afrique ou en Amérique du Sud.
Même l'Arabie saoudite, en raison de gisements plus vieux et plus petits, devrait débourser entre 4 000 et 8 000 dollars par baril supplémentaire produit. Bref, comme le souligne un observateur : Si les Etats-Unis décident de mettre 20 à 30 milliards de dollars dans une guerre en Irak, c'est qu'ils savent pouvoir en recueillir le retour sur investissement assez vite.
Le désir américain de contrôle du pétrole irakien.
Les USA cherchant à limiter leur dépendance vis à vis du l’Arabie Saoudite mènent une politique visant à leur octroyer l’hégémonie sur les ressources pétrolières. Dans cette optique l’Irak devient une opportunité à saisir car elle représente une nouvelle source d’approvisionnement primordiale .
La diversification géographique des ressources en hydrocarbures devient un objectif récurrent de la politique américaine. Exxon Mobil et Chevron Texacco sont trop centrés sur le continent américain. Leurs alliés britanniques lorgnent également sur l’Irak car BP n’est présente que dans les zones ou les gisements rendent les conditions d’exploitation onéreuses. Royal Dutch se trouve pénalisée par l’importance de ses avoirs dans des régions jugées instables (Nigéria ,Angola) .
Les oppositions à la politique américaine.
La volonté d’intervention américaine en Irak a soulevé des oppositions dans la communauté internationale pour plusieurs raisons. En premiers lieux, certaines licences d’exploitation ont été accordées par Bagdad à des entreprises non-américaines mais ne deviendront effectives qu’après la levée du blocus imposé via l’ONU par Washington. Mais pour l’heure, elles n’ont aucune valeur normative. Ces entreprises (une douzaine, mais surtout françaises, russes) craignent de voir ces accords remis en cause en cas de changement de régime. Par ailleurs, il semble acquis que les firmes américaines seront avantagées si Saddam Hussein est renversé et qu’un régime sous tutelle américaine est instauré.
La France en première s’est opposée à la politique américaine de recours systématique de à la force contre l’Irak (c’est peut-être d’ailleurs ce qui explique la fragilisation de la France dernièrement dans ces zones d’influences traditionnelles comme c’est le cas en Côte d’Ivoire). Les discussions ont été vives à l’ONU où la Russie a soutenu la position française. Un compromis a été trouvé sous la forme de la résolution 1441 de l’ONU. Celle-ci prévoit que l’usage de la force contre l’Irak sera possible s’il s’avère qu’il existe des armes de destructions massives, ou si les inspecteurs de l’ONU sont empêchés de travailler dans de bonnes conditions ; mais le recours à la violence doit avoir été décidé par l’ONU.
Néanmoins, la France semble s’être résignée : des préparatifs militaires pour février 2003 sont en cours et Total-Fina fait du lobbying auprès de Washington pour « l’après Saddam ». Ainsi, en dépit d’une légère accalmie il serait étonnant que les américains ne trouvent aucun motif d’intervention en Irak .
Les enjeux géopolitiques à moyen ou long termes .
La « grande stratégie » américaine .
La grande stratégie américaine a pour ambition de contrôler les axes d’approvisionnement en hydrocarbures que sont le Caucase et le Moyen-Orient. L’intervention en Afghanistan a permis aux américains de se positionner en Asie mineure. Les américains se sont désormais installés en Azerbaïdjan, en Ouzbékistan, en Kirghizie, et plus récemment en Géorgie. Leur présence en Asie centrale leur permet en outre de contenir la « super-puissance » en devenir qu’est la Chine. Environ 60% de l’approvisionnement en pétrole de cette dernière se fait au Moyen Orient. Lles USA, en contrôlant cette région, peuvent par la même occasion contenir toutes les velléités offensives chinoises en maîtrisant directement ses sources d’approvisionnement. Le contrôle de l’axe Ankara-Bagdad-Téhéran-Caucase passe donc par une intervention au Moyen-Orient dont l’Irak n’est qu’une première étape. Les Etats-Unis vont tenter de greffer la démocratie en Irak (comme jadis au Japon) après la chute du régime de Saddam Hussein. Cette démocratie coercitive sera présentée comme contre-modèle aux régimes de la région qui leurs sont hostiles. Parmi eux se trouve l’Arabie Saoudite qui depuis le 11 septembre n’est plus perçue comme un allié privilégié car compromis avec Al Qaida. Mais pour l’heure la disparition du régime de Saddam Hussein est la condition « sine qua non » de leur « grande stratégie ». Celle-ci vise, en instituant un régime démocratique en Irak, à isoler l’Iran et à marginaliser, grâce au pétrole irakien l’importance de celui d’Arabie Saoudite.
La discrète stratégie Chinoise .
Avec la question taiwanaise, l’enjeu pétrolier est une des grandes obsessions qui hante la politique étrangère de Pékin. Dans la dernière décennie la consommation de pétrole a crû de 6% alors même que sa production est proche de la stagnation car ses réserves historiques dans le nord du pays sont en voie d’épuisement et les nouveaux gisements dans la province musulmane du Xinjiang souffrent de difficultés d’exploitation.
Le Moyen-Orient qui fournit actuellement les 2/3 des besoins de la Chine en Hydrocarbure en fournira jusqu’à 80% à l’horizon 2010. Dans ces conditions, la Chine suit avec attention l’évolution des tensions au Moyen-Orient ; d’autant plus que la présence de troupes américaines en Afghanistan a ravivé la crainte d’un encerclement. Déjà présent à l’ouest en mer de Chine, le 11 septembre a offert aux américains le prétexte de s’encrer plus fortement en Asie Centrale. Les chinois dont les firmes pétrolières s’étaient multipliées en Asie Centrale (surtout au Kazakhstan) pour s’affranchir de la tutelle américaine (éventuellement en cas de crise du côté de Taiwan),voient donc d’un très mauvais œil le désir hégémonique des américains pour la maîtrise des routes du pétrole .
La Chine qui reste objectivement la plus sérieuse menace des USA dans le futur, paraît être la plus menacée par la politique américaine. Reste à voir quelle incidence la politique extérieure des Etats-Unis aura sur les relations entre les deux pays et quelle contre-attaque peut être menée par la Chine.
Analyse réalisée en Janvier 2003 par des Etudiants de l’Ecole de Guerre Economique ( EGE)