Gemplus : attaque syndicale contre Alex Mandl


Dans une note interne intitulée « un point d’avancement » en date du 5 février , Alex Mandl le PDG de Gemplus a désespérément essayé de plaider sa cause auprès de ses salariés. Il a exposé la nouvelle « stratégie » de Gemplus et a répondu à ceux qui mettaient en cause sa bonne foi (comme par exemple les syndicats ou le site « infoguerre»), sur les omissions de son CV et sur son package


Alex Mandl ayant pris la fâcheuse habitude de ne pas répondre aux médias français (cf. Envoyé Spécial sur France 2 de janvier dernier), il lui fallait donc se justifier auprès des salariés de Gemplus.
Dans la longue litanie des inepties de la Direction , ce document mérite une place au panthéon de la bêtise tant l’argumentaire est mauvais. A croire qu’inconsciemment Alex Mandl souhaite quitter Gemplus où il sent qu’il n’a plus sa place.
Examinons d’abord la stratégie  élaborée depuis son arrivée en septembre 2002. Alors qu’Alex Mandel a fourni le 4 janvier au Board plus de 100 pages pour justifier de la valeur de sa maison, il expose en 9 lignes trois idées géniales qui justifient à elles seules son mirifique salaire :

  • « la compétitivité au niveau des coûts est une réalité à laquelle nous devons faire face »



  • « assurer l'efficacité de l'entreprise et renforcer notre capacité à offrir un service de qualité à nos clients. »



  • « redéfinir nos capacités en matière de Recherche et de Développement pour que l’innovation tienne une place toujours plus importante dans notre futur. »


Alors que Gemplus connaît une descente aux enfers depuis la mainmise de TPG, on reste confondu devant la platitude de cette « stratégie » qui vaudrait une note éliminatoire à un étudiant voulant intégrer une école de commerce. Cette technique fulgurante conduite par Alex Mandl a d’ailleurs causé la faillite de TELIGENT dont il était PDG.
S’il n’y avait pas eu depuis 2001 le licenciement de 3000 salariés au niveau mondial, un nouveau plan de licenciement de 320 personnes en France dans les bureaux du DRH et la disparition de 600 millions d’euros de trésorerie depuis décembre 2000, de telles bêtises pourraient prêter à rire...

Ensuite, continuant allègrement à enfoncer des portes ouvertes, Alex Mandl indique qu’il faut « travailler tous ensemble à travers le monde ». Il faut dire que Gemplus qui réalisait 90% de son chiffre d’affaires hors de France ne s’était jamais rendu compte de cette réalité ! Merci à TPG et à Alex de nous l’apprendre...
N’hésitant pas à entrer dans les détails, Alex s’adresse ensuite au DRH qui prépare le futur plan social, au Directeur Juridique qui prépare la liquidation de Gemplus SA France et au Directeur Financier qui s’apprête à verser des primes aux dirigeants : « ne ralentissez pas, n’arrêtez pas ce que vous êtes en train de faire, n'attendez pas que toutes les réponses soient clairement fournies, mais continuez ce que vous faites . »

Dans son paragraphe final intitulé « pas à pas » Alex Mandl conclut par une formidable envolée lyrique qui a fait s’enthousiasmer tout le personnel de Gemplus : « Il ne fait aucun doute que l'année qui s'annonce apportera sa part de défis, mais également de récompenses ». Ce grand connaisseur de Gemplus montre toute sa science en affirmant : « Nous avons déjà reçu des échos positifs concernant notre progression en Chine » oubliant que dans son dernier ‘profit warning’ Gemplus imputait ses mauvais résultats à la Chine.

La « pièce de résistance » vient ensuite dans un « rappel des faits » dans lequel il tente de répondre aux critiques. N’ayons pas peur des mots, Alex Mandl réussit là un chef d’œuvre de communication.
Ce document rappelle que «Alex Mandl est un homme d'affaires respecté aux Etats-Unis ». C’est sans doute la raison pour laquelle il est impliqué en tant qu’ancien Directeur Général (COO) de ATT dans une « class action » à New York pour diffusion de fausses actions, et qu’il est critiqué pour avoir empoché un bonus de 20 millions de dollars de la part de TELIGENT qu’il mènera très rapidement à la faillite. Ce sont certainement des syndicats français qui ont du lancer ces actions judiciaires.

Alex Mandl dans un paragraphe de 23 lignes attaque bille en tête sur son package. Il n’a rien à cacher (sic)mais on ne comprend pas ses explications. D’ailleurs, il se garde bien de citer un seul chiffre ! On admire simplement la modestie et la générosité innées du personnage qui n’hésite pas indiquer que « Alex Mandl a volontairement proposé de modifier ce package » (il parle de lui à la 3ème personne).

Peut-être ne lit-il pas la presse ou les sites syndicaux mais il loupe le problème qui est pourtant « gros comme une maison ». Sa maison précisément qu’il a évalué à 15 millions de dollars et pour laquelle il perçoit depuis septembre des frais de maintenance de 80 000 dollars par mois. Le problème c’est que suite à l’enquête menée à la demande d’un administrateur qui a été viré (!) on sait que cette maison achetée en mars 1998 pour 1.860 .000 dollars a été évaluée par le fisc américain en janvier 2002 à 2.338.390 dollars et que les frais de maintenance sont estimés à 2000 dollars par mois. (Enquête de CAPITOL INQUIRY).
On pourrait croire qu’il y a une grosse arnaque. Pas du tout ! Alex Mandl nous rassure pleinement en disant que « le conseil étudie cette question » . Et puis n’affirme-t-il pas « toute déclaration insinuant que M. Mandl ne se serait pas montré franc ou qu'il aurait détourné des fonds de la société est absolument sans fondement. »
Reste quand même la justification du versement mensuel des 80.000 dollars pour frais de maintenance ... si il n’arrive pas à justifier de cette somme, c’est qu’il a commis un abus de bien social !

Alex Mandl s’explique enfin sur les oublis de son CV et le CV lui-même. L’oubli de la mention du poste d’administrateur chez IN-Q-TEL résulte d’un oubli du « cabinet de recrutement » dont les initiales doivent être D.B . Ce cabinet s’est trompé en envoyant un vieux CV et cette erreur a été corrigée. Mais encore une fois pas de chance, le facteur de Lassus et de Takieddine a du se casser la jambe et n’a jamais pu distribuer le CV corrigé.
Selon lui, tout ça n’a aucune importance car «IN-Q-TEL est une organisation distincte, complètement extérieure à la CIA ». C’est vraiment le fait du hasard si celle-ci finance à 100% cette organisation qui est hébergée dans des locaux lui appartenant. C’est encore le fait du hasard si beaucoup d’investissements de IN-Q-TEL sont liés à la cryptologie et à la sécurisation de l’Internet au service du gouvernement des Etats-Unis. Alex Mandel indique également qu’il ne dépend pas de la CIA. Bien entendu, si tel était le cas, il ne manquerait pas d’en faire part aux salariés de Gemplus !

La modestie du personnage lui font ensuite totalement sous-estimer son rôle dans le programme « Total Intelligence Awareness » dans lequel il est expliqué qu’il était important pour les Etats-Unis de contrôler l’Internet en s’emparant si besoin était de technologies étrangères et dans le « Business Executives for National Security » (BENS), groupe d'entrepreneurs et d'ex-militaires conseillant le Pentagone et les agences de renseignement, pour lequel il a dû oublier de lire le site internet.

Pour conclure, à son attention, le vieux proverbe « qui sème le vent, récolte la tempête »

Agnel Salerno, délégué syndical Gemplus.