Le soldat Gemplus n'est pas encore sauvé !

Le rachat des actions de Marc Lassus par SAGEM est une bonne nouvelle. Le contrôle fiscal sur Gemplus est paradoxalement une autre bonne nouvelle dans la mesure où l'Etat met son nez dans les affaires de cette société en s'interrogeant indirectement sur la délocalisation de son siège au Luxembourg (transfert des brevets de la société de Gemplus au Luxembourg qui ouvre la voie à une défiscalisation.
Mais le risque de perte de contrôle de Gemplus au profit des Américains est encore important et la pression ne doit pas s'arrêter.
Un de nos correspondants nous a signalé que dans les greniers de la République sommeillent quelques procédures qui pourraient éventuellement servir d'ultime grain de sable. Sait-on jamais ....

Il existe une solution juridique qui permet de protéger les intérêts nationaux dans l'affaire GEMPLUS.

En effet, si l'autorité politique considère que les technologies liés aux cartes à puce sont essentielles pour notre Nation, et relèvent donc de la définition des intérêts fondamentaux de la Nation , une action rapide et forte des pouvoirs publics, par l'intermédiaire du Parquet, peut avoir raison des vélléités américaines de prise de contrôle.

Les intérêts fondamentaux de la nation s'entendent au sens du code pénal français de son indépendance, mais aussi de la sauvegarde des éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique .

Plusieurs infractions prévues au code pénal existent pour protéger ces intérêts :

- Le fait d'entretenir des intelligences avec une puissance étrangère, avec une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou avec leurs agents, lorsqu'il est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, ce qui peut être le cas s'il est démontré qu'il s'agit d'un plan conçu dans le but de capter la propriété intellectuelle des technologies.

- Le fait de livrer ou de rendre accessibles à une puissance étrangère, à une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou à leurs agents des renseignements, procédés, objets, documents, données informatisées ou fichiers dont l'exploitation, la divulgation ou la réunion est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, ce qui peut être avéré dans le cas d'espèce GEMPLUS.

- Le fait de recueillir ou de rassembler, en vue de les livrer à une puissance étrangère, à une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou à leurs agents, des renseignements, procédés, objets, documents, données informatisées ou fichiers dont l'exploitation, la divulgation ou la réunion est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation pourrait être également visé le cas échéant.

Par ailleurs, la loi de blocage française de 196
réserve des traités ou accords internationaux, il est interdit à toute personne physique de nationalité française ou résidant habituellement sur le territoire français et à tout dirigeant, représentant, agent ou préposé d'une personne morale y ayant son siège ou un établissement de communiquer par écrit, oralement ou sous toute autre forme, en quelque lieu que ce soit, à des autorités publiques étrangères, les documents ou les renseignements d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique dont la communication est de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, aux intérêts économiques essentiels de la France ou à l'ordre public, précisés par l'autorité administrative en tant que de besoin.

Il apparaît alors clairement que, ne serait-ce que pour donner du temps au temps, l'ouverture d'une information judiciaire du chef d'atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation permettrait un blocage des droits de propriété intellectuelle, le temps de mener les investigations qui seront longues à n'en pas douter. La société française pourrait continuer d'exploiter ces droits mais la cession en serait impossible. Un placement sous contrôle judiciaire interdisant toute cession pourrait être efficace dans ce cadre.

Par ailleurs, si ces droits ont déjà été placés dans des entités de droit étranger, une action judiciaire civile en annulation fondée sur une violation de la loi pénale aurait toutes les chances d'aboutir.

La technique, quelque peu violente juridiquement à l'égard des américains impliqués dans ce dossier, est à la hauteur de l'agression et des enjeux. La balle est dans le camp des politiques, seuls à même de donner les instructions en ce sens au Ministère public. Il serait dommage que l'Etat doive être supléé dans son rôle par des particuliers devant se constituer partie civile afin de protéger le patrimoine économique national, si tant est qu'une partie civile soit recevable en matière d'atteinte aux intérêts dondamentaux de la Nation.