Edito : Manifeste: Le Grand Défi

Infoguerre le soutient et appelle ses internautes à signer ce texte, symbole de la volonté de notre génération et de celles qui nous suivent.

MANIFESTE: LE GRAND DÉFI…



C’est une tradition française : les jeunes générations et les nouvelles écoles se jettent au milieu de l’arène en brandissant un texte comme oriflamme. Nous respectons l’usage et lançons donc un manifeste dans la bataille. Qui sommes-nous ? Des trentenaires en colère, excédés par les abandons répétés de leurs aînés, mais plein d’énergie et de résolution, croyant indissolublement en la modernité individualiste et en notre nation, en l’Europe et au futur. Nous sommes lassés des fatigués, des égoïstes et des cyniques, sans être pour autant désordonnés, réactionnaires et naïfs : tout au contraire … Nous sommes faustiens et « machiavéliens », convaincus des possibilités infinies des hommes, des individus, et décidés à agir en stratèges pour contribuer à les mener plus loin, sachant qu’il faut de la finesse et de la prudence pour graver des rêves dans la pierre de la réalité.

Tout aussi éloigné du conservatisme que du « bougisme », nous rejetons les vieilles lunes, et visons, malgré les railleurs, à dépasser le clivage droite/gauche. Nous avons peu d’alliés chez les politiciens, et beaucoup d’ennemis … Nous entendons tirer les leçons de l’échec de la politique étrangère du Général de Gaulle, mais nous inspirer de son exemple.

Nous appelons de nos vœux la construction d’une doctrine de puissance française et européenne, pour mettre en œuvre un projet de société consistant. Projet politique, diagnostic stratégique, doctrine de puissance et système de forces : voilà nos formules clefs, et volontiers insolentes – parce que nous en avons assez de ceux à qui les mots font peur.

Nous voulons désentraver ceux de notre génération, pour les propulser par-delà droite et gauche. Le but est ambitieux, mais nous n’avons plus le choix. Il faut viser haut, ou consentir à une crasse médiocrité. Pour notre part, nous n’imaginons pas les trentenaires marcher sur les pas des soixante-huitards attardés. Nous devons nous débarrasser définitivement des querelles de nos aînés. Après tout, que nous ont-ils laissé ? Leur bonne conscience et un impressionnant passif … Leur tour de passe-passe pour évacuer l’heure des bilans est d’une simplicité atterrante : « Nous nous sommes peut-être trompés, larmoient-ils faussement, mais nous étions diablement généreux et épris d’absolu : cela pardonne tout ! » Les tigres se qualifient bien hâtivement de papier … En tout état de cause, le moins que l’on puisse dire, c’est que les doux rêveurs des années hippies se sont métamorphosés à merveille en notables prospères, rose bonbon ou bleu azur. Nous nous tordons de rire à chaque fois que nous imaginons Serge July en révolutionnaire … Les enfants de Mai ne s’épargnent décidément aucun effort pour poser en libéraux raisonnables … Ces caméléons virtuoses se caractérisent par leur refus de la transmission, qui n’est qu’un refus d’autrui : incroyable génération de parricides et d’infanticides, tout à la fois, peut-être la première, ou en tout cas la plus accomplie de l’Histoire ! Ils ont tué le père en soixante-huit et égorgent leurs enfants pour inaugurer le millénaire. Beau palmarès … Dans la grande course aux places, ils arrivent en tête. Ils ont refusé la succession mais encaissé l’héritage ; ils ont fui leur responsabilité de pères mais arguent de leur droit d’aînesse pour nous imposer leurs privilèges et justifier leurs fiefs ; ils ne veulent pas diriger mais s’entendent à dominer … Quels sont-ils leurs hauts faits d’arme ? La libération sexuelle ? Lisez Foucault messieurs les émancipés, comme les trentenaires l’ont fait – sans doute plus attentivement –, et nous aurons de quoi en discuter de votre « hyper-libération »… Ce qu’elle avait d’ailleurs de grand et de beau, vous l’avez perverti, en confondant sexualité libérée et laisser-aller tous azimuts, en l’identifiant au refus de la responsabilité envers l’autre qu’exigent l’amour et la vraie tolérance.

Quant à l’aventure humaine dont se gargarisent ces faux affranchis, je n’en vois plus trace nulle part, ni dans leurs yeux, ni dans leurs mots, ni dans leurs actes. Ils se contentent donc aujourd’hui d’un seul grand but : nous empêcher de penser et de créer, en usant du terrorisme intellectuel le plus plat, en nous contraignant à passer sous les fourches caudines du politiquement correct. Ils nous dénient tout bonnement le droit de bâtir notre propre avenir, nous jugeant sans complexe du haut de leurs échecs de psychorigides gauchistes défraîchis ! Modernes et progressistes, vous ? Mais nous sommes bien plus à gauche, noblement et viscéralement, que vous ne le serez jamais. Nous sommes prométhéens et individualistes alors que vous étiez et demeurez holistes, totalitaires, attachés à la société comme monstre de servitude, à la manière léniniste, trotskiste ou maoïste ! Nous croyons à l’individu, à l’homme concret, de chair et de sang : nous voulons son épanouissement et ne confondons pas ce mot avec l’égoïsme, l’étroit matérialisme qui vous caractérise si bien, vous qui avez tellement bien « géré » vos carrières, vos actions et obligations … Et parce que notre philosophie naturelle est de gauche, nous sommes politiquement au-delà des recettes et des scléroses de tous les partis : nous avons peu de goût pour les dogmes. Nous exigeons de la volonté et de l’imagination, de la persévérance et de la rigueur : peu importe les panoplies juridiques et les modalités techniques. L’heure est venue des instruments efficaces, quels qu’ils soient, pourvu qu’ils respectent les libertés individuelles. Que la stratégie succède donc à l’orthodoxie !

Nous voulons un État stratège, c’est-à-dire une volonté politique et un projet digne de notre nation. Nous entendons renouer le fil de l’Histoire de France, apprendre du passé et transmettre à nos enfants, leur faire le présent d’un monde meilleur, d’un idéal, ces espérances qui font tant rire aujourd’hui ceux qui veulent passer pour d’anciens rêveurs, voire pour les inventeurs de l’utopie ! Nous voulons une France digne de son passé et maîtresse de son avenir, c’est-à-dire capable de proposer un grand dessein à l’Europe, de savoir la faire naître à la puissance, de lui faire concevoir une doctrine de puissance, en empruntant des voies encore inexplorées, et en osant affirmer qu’elle la veut sous influence française, ou disons d’inspiration française, sans qu’une telle ambition impose a priori un dogme fédéral ou confédéral qui ignorerait la dynamique européenne, encore incertaine de ses formes institutionnelles. En tout état de cause, notre Europe est une auberge espagnole !

Nous voulons lutter pour un autre modèle de civilisation que celui des Etats-Unis, pour s’opposer à leur tentation impériale, à leur penchant hégémonique, et parce que nous croyons que leur statut de démocratie exige qu’ils combattent leurs démons intérieurs. Sans haine ni mesquinerie, et dans l’espérance d’une future et plus saine relation entre « l’hyperpuissance » et le reste du monde, nous nous lancerons résolument dans le combat asymétrique, la stratégie du « faible » au fort, avec la ferme intention d’être de farouches adversaires dans la guerre de l’information – qui a déjà largement commencé –, inventant chaque jour les armes les plus convaincantes de la guerre cognitive. De jeunes hommes de cet Âge de cristal, qui n’entendent pas mourir à trente ans, qui ne prisent guère le déclin et la défaite, quelque soit leur visage, nous rejoindront inéluctablement, chaque jour un peu plus nombreux et résolus. L’heure du ralliement a sonné, le rassemblement des compagnons et frères de génération a commencé. Puissent ces quelques mots contribuer à faire grossir plus rapidement nos rangs, et constituer le terreau de notre doctrine, qui refuse toute orthodoxie, dogme idéologique ou système carcéral, mais exprime simplement un faisceau de convictions, un appel au combat pour toutes les volontés, et un message d’espoir pour nos filles et nos fils…



Eric DELBECQUE



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