Christian Harbulot signe l’édito de la Lettre de l’innovation et de l’intelligence économique CCI France
Christian Harbulot signe l’édito de la 21ème lettre de l’innovation et de l’intelligence économique de CCI France du mois de janvier 2015.
L’attentat contre Charlie Hebdo est un avertissement. La réponse émotionnelle qui s’est exprimée à travers le monde et dans de nombreuses villes françaises est impressionnante et salvatrice mais elle ne résout rien sur le fond. Derrière ces élans du cœur se cachent des contradictions lourdes de sens: les sifflets entendus sur certains lieux de manifestation spontanée à Paris lorsque des personnes entonnaient la Marseillaise démontrent à quel point une partie de la population ne se reconnait plus dans une relation cohérente avec la France.
Si l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo n’est pas forcément le signe du déclenchement d’une campagne terroriste de grande ampleur sur le territoire national, il démontre qu’une situation dégradée épisodique est désormais possible. Un attentat similaire commis par des individus isolés dans une église, dans une école ou dans un lieu public aurait des conséquences sans doute très différentes de la vague d’attentat commis lors des années 1990 et 2000 par des cellules isolées de l’islamisme radical.
L’attitude très pacifique que la population française adopta à cette époque pourrait ne pas résister à un usage jusqu’au-boutiste de la terreur. La croyance dans les vertus de la démocratie pourrait être très vite assimilée à une politique de l’autruche déjà pointée du doigt par des auteurs à succès. La sagesse actuelle affichée par l’opinion publique pourrait très vite être balayée par l’émergence d’un contre-terrorisme sauvage dont l’appareil d’Etat aura le plus grand mal à canaliser les effets boomerang, en particulier dans les zones sensibles périurbaines.
Au-delà du contexte passager créé par un acte de violence gratuite, la population de ce pays doit faire face aujourd’hui à plusieurs défis majeurs, dont celui de la cohérence de la politique de puissance de la France. Concernant ce défi, force est de constater qu’on a du mal à comprendre la cohérence de la politique française sur le plan international. De la guerre du Golfe, en passant par le refus d’intervenir en Irak, les résultats très mitigés sur la finalité de l’intervention militaire française en Afghanistan, les conséquences catastrophiques de l’intervention française en Lybie, les atermoiements gouvernementaux sur la volonté de sévir contre le régime syrien…
La participation militaire mesurée contre les forces qui se sont proclamées « l’Etat Islamique » nous amène même à une position quasi schizophrénique par rapport à Bachar El Assad. Le silence désarmé des autorités françaises contre les massacres perpétrés contre les communautés chrétiennes au Moyen Orient renforce ce sentiment d’injustice dans le traitement des problèmes. Les chrétiens du Moyen Orient sont-ils devenus les juifs des années 40, c’est-à-dire un non débat dans la conduite de la guerre ? Les déclarations gouvernementales françaises sont loin de nous apporter des réponses pertinentes sur ce sujet pourtant très sensible dans ses retombées futures.
Quand aurons-nous une vision claire et surtout une approche cohérente de la politique extérieure de la France ? Paris refuse de livrer des navires à la Russie pour protester contre la politique de Poutine en Ukraine. La France refusera-t-elle de livrer de l’armement à des Etats arabes qui soutiennent indirectement des groupes terroristes de l’islam radical ou qui noyautent l’implantation de certaines mosquées sur le territoire national ? Ces questions ne peuvent rester éternellement sans réponse.
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