Qui est concerné par l'intelligence territoriale ?

Bien que l'intelligence territoriale s'inspire des fondements de l'intelligence économique, elle constitue une discipline à part entière. La loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite MAPTAM, a été votée en 2014, visant à renforcer l'intelligence territoriale, pour rendre aux régions le leadership sur le développement économique, les aides aux entreprises et les transports. Promulguée en 2015, la loi NOTRe renforce les compétences aux régions et redéfinit les compétences pour chaque collectivité territoriale. Mais qu'est-ce que l'intelligence territoriale ? Quels en sont les acteurs et les enjeux ? Un tour d'horizon complet pour tout savoir sur l'intelligence territoriale. 

Qu'est-ce que l'intelligence territoriale ?

Le concept de l'intelligence territoriale, encore récent, repose sur celui de l'intelligence économique. En 2003, dans son rapport sur l'intelligence économique, le député Bernard Carayon écrivait : « Les territoires sont le creuset d'activités économiques juxtaposant savoir-faire traditionnels et technologies avancées. La promotion de leurs intérêts apparaît directement liée à leur capacité à s'organiser en réseaux, en adoptant une démarche qui repose sur l'articulation et la mise en œuvre d'une politique d'intelligence économique par la compétitivité/attractivité, l'influence, la sécurité économique et la formation. » 

Convaincues de l'importance des entreprises, ancrées dans un territoire et essentielles pour faire face à la concurrence, les collectivités territoriales commencent à s'intéresser au concept de l'intelligence territoriale. Bien que distincts, les deux concepts présentent des similitudes. Alors que l'intelligence économique s'applique aux entreprises et aux États, l'intelligence territoriale utilise ces mêmes principes au service du développement industriel et économique du territoire, dans le cadre d'une action publique.  

L'un des principes de l'intelligence territoriale est d'anticiper les changements socio-économiques, par la maitrise de l'information stratégique, son partage et son utilisation au service des acteurs économiques. Veille informationnelle et action publique sont liées pour construire des politiques et des savoir-faire qui favorisent le territoire, en tant qu'élément essentiel de la compétitivité des entreprises qui s'y installent. La création de valeur ajoutée ainsi que les connaissances des acteurs économiques sont renforcées avec la stratégie de l'intelligence territoriale mise en place. En période de crise économique, pour faire face aux mutations inévitables, elle apparaît comme un outil d'analyse pour affecter les moyens et partager les informations, en vue d'inciter le collectif à construire une dynamique de développement. Les territoires sont perçus comme des systèmes dynamiques, à observer en temps réel, pour déterminer des politiques, à la fois efficaces et adaptées.  

L'analyse peut se faire selon deux logiques : 

  • Une logique descendante : déclinaison de l'intelligence économique, pilotée au niveau d'un territoire, l'intelligence territoriale permet de sensibiliser les entreprises, en leur fournissant les méthodes et outils, ainsi que les moyens pour entamer une démarche d'intelligence économique. À l'instar des entreprises, c'est aussi l'application des techniques de l'intelligence économique aux territoires, collectifs ou groupe de collectivités : veille, sécurité, stratégie, influence... 

  • Une logique ascendante : elle prône un développement du territoire, en privilégiant l'humain, en tenant compte de son contexte social, économique et géographique, en tant qu'entité socio-économique. Cette approche s'apparente à celle du développement économique durable.  

Ces deux approches ont un seul et même but : l'attractivité et la compétitivité des territoires. Il s'agit donc de trouver un équilibre entre l'autonomie des collectivités territoriales et le pilotage de l'État. Tout s'articule autour du respect du dispositif public et de l'acceptation par l'État des spécificités des territoires.  

Qui étudie l'intelligence territoriale ? 

Les acteurs de l'intelligence territoriale

L'implication collective d'un ensemble d'acteurs et de parties prenantes est requise pour mener à bien les actions nécessaires. L'intelligence territoriale résulte d'un partenariat entre pouvoirs publics, collectivités territoriales et entreprises, pour conduire un certain nombre d'actions dans des domaines tels que la veille stratégique, le management des connaissances, la sécurité économique ainsi que des stratégies d'innovation et d'influence. 

On peut ainsi recenser les différents acteurs et parties prenantes : 

  • Les administrations et institutions : Préfectures, Banque de France, Conseils départementaux et régionaux. 

  • Les collectivités : Mairies, Communautés de Communes, Agglomérations, Métropoles. 

  • Les entreprises : Entreprises Leaders, Start-up, Filières, Pépinières. 

  • L'enseignement supérieur : Grandes Écoles, Écoles d'Ingénieurs, Universités, IUT, Écoles Privées, Lycées. 

  • L'innovation : Centres de Recherche, Laboratoires, Pôles de Compétitivité. 

  • Les fédérations : Salariales, Patronales et Métiers. 

  • Les associations : Associations stratégiques et influentes. 

  • Les médias : Presse, Radio, Télévision, Web. 

  • Les personnalités : Politiques, Ambassadeurs, Experts, Compétences. 

  • La culture : Tradition, Musées, Tourisme, Gastronomie. 

  • Les événements : Événements Business, Sportifs, Culturelles, Conférences. 

Les outils de l'intelligenc territoriale

Les outils sont répertoriés en quatre domaines, endogènes et exogènes. 

Le premier domaine concerne la veille territoriale, dont les acteurs stratégiques sont les médias locaux, les données publiques ou les réseaux sociaux. Il s'agit de surveiller les acteurs endogènes pour les aider à maintenir leur développement. La veille extra territoriale est tout aussi importante et vise à surveiller l'environnement exogène pour anticiper les mutations susceptibles d'impacter le territoire.  

Dans ce cadre, l'Observatoire économique et territorial est mis en place dans les régions pour collecter et diffuser les informations économiques nécessaires à la prise de décision, que ce soit celle d'acteurs économiques, comme les chefs d'entreprise, ou les acteurs politiques. À la demande d'entreprises ou d'institutions, il établit des diagnostics territoriaux. Il analyse et suit le tissu économique, pour contribuer à l'attractivité des territoires. Il met à disposition un certain nombre d'outils d'aides à la décision et permet de consulter les informations essentielles dans un certain nombre de secteurs clés :  

  • Le commerce extérieur : partenaires commerciaux, montant des échanges, classement des produits importés et exportés. 

  • L'activité économique : création et fermeture d'entreprises, évolution des effectifs… 

  • La démographie : répartition de la population par tranche d'âge, sexe, catégorie socio-professionnelle… 

  • L'emploi : indicateurs des taux de chômage, du nombre de demandeurs d'emploi. 

  • La formation : répartition du nombre d'établissements par type d'enseignement ou des élèves par diplôme… 

  • La fiscalité : évolution des taux de recettes des principales taxes locales, impôt sur le revenu… 

  • La construction et les logements : évolution des logements en cours de construction, répartition des logements et des équipements par type d'habitation… 

  • Les transports : évolution de l'ensemble du trafic routier, ferroviaire, aérien et de marchandises… 

  • Le tourisme : données essentielles sur le nombre de touristes, taux d'occupation des hôtels, fréquentation des sites culturels… 

Le deuxième domaine tourne autour de l'innovation territoriale, qui consiste à recenser les compétences et ressources stratégiques pour les adapter aux besoins, identifiés collectivement, des acteurs économiques. Le tout dans une démarche d'amélioration du bien-être des habitants et de développement durable. Elle mobilise de manière directe les acteurs locaux et crée ainsi les conditions de l'expression d'une intelligence collective.  

L'intelligence territoriale concerne également la mise en œuvre d'un marketing territorial, visant à rassembler les acteurs d'un même territoire autour d'un projet collectif, mobilisant une boite à outils, composée de méthodes, analyses, techniques et bonnes pratiques à travers le monde. En agissant sur la fierté d'appartenance territoriale et en impliquant les ambassadeurs du territoire, le marketing territorial permet de renforcer l'influence du territoire et de faire face aux marchés concurrentiels. L'attractivité ainsi obtenue permet de maintenir les ressources en compétition et d'en attirer d'autres, en provenance de l'extérieur.  

Enfin, le dernier domaine d'outils d'intelligence territoriale a un lien avec la sécurité territoriale. 

En matière de protection du patrimoine national, elle est du ressort de la Direction Générale de la Sécurité Intérieure (DGSI), créée en 2014, et chargée de protéger les intérêts nationaux contre toute atteinte. Les menaces sont diverses : actes de malveillance, rachat d'entreprises stratégiques par des intérêts étrangers, atteinte à l'image des entreprises, espionnage industriel… La DGSI a pour mission de détecter toute ingérence d'acteurs étrangers. Elle joue un rôle d'analyse des informations afin d'alerter les autorités et de sensibiliser l'ensemble des acteurs économiques. Le directeur régional de la DGSI a un rôle de conseiller auprès du préfet dans les domaines liés à la préservation du patrimoine industriel et scientifique et à ceux de la contre ingérence économique. La Gendarmerie nationale et la Direction du Renseignement et de la Sécurité de la Défense (DRSD) viennent soutenir ces dispositifs.  

En matière de cybercriminalité, en hausse ces dernières années, l'action est conjointe entre le Ministère de l'Intérieur dont dépendent la Police, la Préfecture de police et la gendarmerie et le Ministère de l'Action et des comptes publics. 

Les intervenants sont nombreux et les mécanismes parfois complexes. Si vous souhaitez vous former aux différents aspects de l'intelligence économique face à un monde concurrentiel, le MBA management stratégique enseigne des méthodologies adaptées aux nouveaux besoins des décideurs.  

A sert l'intelligence territoriale ? 

L'intelligence territoriale repose sur des enjeux : 

  • Liés au numérique : tri des informations pertinentes et sécurisation des données en luttant contre la cybercriminalité. 

  • Liés à la gouvernance : implication collective entre privé/public dans une démarche de mutualisation territoriale. 

C'est alors une opportunité pour les acteurs économiques d'avoir une meilleure connaissance du territoire par la maitrise des canaux de l'information, dans le respect des principes de gouvernance. Elle permet de connaitre les concurrents, les donneurs d'ordre, les normes pouvant avoir un impact sur l'activité et d'agir en conséquence sur l'environnement. Elle permet d'identifier les risques, de sécuriser, de repérer les opportunités facteurs de succès, avec comme principal enjeu une stratégie pour influencer le monde extérieur dans un souci de compétitivité internationale. 

L'intelligence territoriale se déploie dans un ensemble très large de domaines de l'action publique : l'aménagement du territoire, l'environnement, l'administration, le développement économique, la sécurité, le patrimoine, la citoyenneté, le tourisme… 

 

Parmi les différents intérêts d'une mise en œuvre d'une intelligence territoriale, on peut citer :  

  • La réalisation de projets en vue de créer de l'emploi et de la richesse. 

  • Une meilleure connaissance du territoire et la maîtrise de l'ensemble de ses ressources. 

  • Le renforcement de l'influence sur l'extérieur et l'attractivité des territoires. 

  • L'identification des enjeux pour l'avenir, dans le cadre d'une prospective territoriale. 

  • L'anticipation des menaces liées aux mutations économiques ou face aux crises et la capacité de réaction. 

  • L'animation des réseaux de développement économiques et sociaux du territoire. 

  • L'amélioration des infrastructures. 

  • L'amélioration du bien-être des individus dans une démarche de développement durable.